Sonia vous invite à réfléchir sur les circuits courts à Marseille ! Bien que vantés pour leur contribution à une alimentation durable, leur histoire révèle une réalité complexe. Depuis la révolution française, Marseille n’a jamais pu totalement subvenir à ses besoins alimentaires localement en raison de contraintes géographiques et de la prédominance du port. L’urbanisation massive dans les années 60 a accentué ce phénomène, favorisant l’émergence de la grande distribution et l’importation de produits alimentaires. Aujourd’hui, malgré une tendance à promouvoir le local et la saisonnalité, l’équilibre entre circuits courts et longs demeure crucial pour nourrir la métropole, tout en encourageant une alimentation plus durable.
Aujourd’hui, les circuits courts et la production locale sont mis en avant dans notre quotidien. Une alimentation durable avec de la nourriture produite à moins de 100km de chez soi. Comme dans le temps…
Vraiment ?
Nous avons cette vision historique d’une autosuffisance alimentaire. Pourtant à la révolution française déjà la production à Marseille et ses alentours n’était pas capable de nourrir sa population. Une population qui ne cesse de croître passant de 115 000 habitants en 1800 à 400 000 au tournant du XXe siècle. Le manque d’eau et l’aridité des terres ne permettaient pas à Marseille de faire pousser de quoi nourrir toute sa population et déjà la prépondérance du port permettait de faire venir du blé du Levant dès le XVIIIème siècle. Il y avait par exemple localement de la vigne et de la production de vin mais une grande quantité de vin était aussi importée d’Algérie à moindre coût . Le pain et le vin étant des éléments essentiels au quotidien des marseillais. La colonisation de l’Algérie a aussi accéléré le commerce d’oranges et de dattes, diversifiant peu à peu les paniers de fruits sur les tables provençales.
En 1849 un autre événement va changer Marseille : la finalisation du Canal de Marseille et l’arrivée des eaux de la Durance. D’anciennes zones arides se sont développées en cultures maraîchères, comme à Château Gombert ou à Bonneveine. La ramification des déverses en eau améliorent le rendement mais ne permettent toujours pas de rattrapper les besoins d’une population grandissante avec une immigration importante d’ouvriers pour les usines marseillaises.
Cette industrie s’axe aussi sur l’alimentaire, avec le développement des raffineries de sucre St Louis, les pâtes Rivoire et Carret, les usines d’huile d’arachide, de végétaline, des pastis ou de Picon… Des môles portuaires dédiés à l’alimentation sont créés comme celui dédié au stockage des animaux près des abattoirs St Louis. Toutes ces denrées viennent de loin. Dans la première moitié du XXe siècle, 75% des échanges du port de Marseille se font avec le Maghreb.
Dans les années 60, l’urbanisation de Marseille explose. Des quartiers maraîchers comme St Marthe ou Le Merlan sont bétonnés et les champs disparaissent. L’essor de la grande distribution fait apparaître un nouveau modèle de consommation avec une baisse des prix de l’alimentation mais également une perte de la saisonnalité des produits. En 1970 le premier hypermarché Casino ouvre à la Valentine suivi plus tard par les zones commerciales du Merlan et de Bonneveine. Dans les années qui suivent, Marseille atteint le million d’habitants. En 1973 le MIN (Marché d’Intérêt National) Marseille Méditerranée est créé pour subvenir aux besoins de cette population.
Aujourd’hui une remise en question de ce modèle veut remettre le local, la saisonnalité et l’alimentation durable sur le devant de la scène. Le MIN de Marseille Méditerranée met en avant le plus grand carreau de producteurs de France et un travail sur la durabilité alimentaire avec le Projet Alimentaire Territorial. Les supermarchés promeuvent le Made in France pour répondre aux demandes des consommateurs. Les AMAP et circuits courts se développent. Mais tout le monde ne peut pas acheter local. L’augmentation des prix de l’alimentation et l’inflation mettent à mal économiquement de nombreux ménages. Et même si ce n’était pas le cas, la production locale est loin de suffire pour nourrir les presque 2 millions de personnes de la Métropole Aix-Marseille-Provence. Sur notre territoire, les circuits courts et circuits longs sont nécessaires et complémentaires. Cependant tous n’obéissent pas à la même réglementation. La nécessité des circuits longs ne doit pas négliger la mise en avant d’une progression des circuits courts et d’une alimentation plus durable.