un article d’Alix Felgerolles et d’Estelle Daumas
Avec le contexte économique, l’inflation alimentaire a atteint +21,1% depuis le 01/01/22 selon UFC Que Choisir, ce qui représente la plus forte hausse du prix des denrées alimentaires depuis plus de 40 ans. Les individus ont de moins en moins les moyens de s’alimenter à leur faim mais aussi correctement. L’accès aux produits sains, nutritifs et locaux est de plus en plus restreint, inadéquat ou incertain.
Le phénomène est à relier avec les difficultés sociales liées aux difficultés économiques ; les personnes sans emploi, avec peu ou sans ressource, ou encore les personnes en situation de handicap se retrouvent avec la double peine de la précarité alimentaire et de l’isolement social.
Comment faire pour se retrouver, et plus précisément, comment l’alimentation peut être un moyen de créer ou resserrer les liens sociaux, de s’insérer dans un groupe, de se relier aux autres ?
En se concentrant sur la ville de Marseille, nous avons choisi de présenter des structures qui se basent sur des outils de prévention et de lutte contre la précarité alimentaire ET l’isolement social. La nourriture peut être une force ; alors brandissez vos baguettes !
Le concept de « participation » traverse tous les projets que l’association En Chantier met en place depuis plus de 15 ans. Un de leur principal, La Cantine du Midi, répond totalement à cette logique. Ouverte sous forme d’atelier-formation, tout le monde peut s’y rendre et prendre part à l’organisation et aux tâches que demande un restaurant comme par exemple la co-élaboration des menus ou la préparation du repas du midi. La cuisine est appréhendée dans un but de « décloisonner les liens sociaux », comme le dit Sarah, la responsable.
Que ce soit par l’apprentissage et la transmission de compétences professionnelles ou par la provocation d’échanges humains et culturels d’un point de vue interpersonnel, la cantine située à la Belle de Mai porte complètement la lutte contre la précarité alimentaire ainsi que l’isolement social.
Dans la même démarche, la Cuisine du 101 est un lieu co-construit ouvert aux personnes à la rue ou hébergées à l’hôtel et en foyer qui n’ont pas la possibilité de cuisiner. Elles peuvent apporter leurs ingrédients, cuisiner, emporter ou se restaurer sur place. Le mercredi, des animateurs et animatrices proposent des ateliers de cuisine, de création artistique, également accessibles aux associations et écoles du quartier. L’occasion de discuter, créer du lien et mieux se connaître
Ce lieu va donc bien au-delà de sa fonction culinaire. Il apparaît comme un espace d’accueil, de nécessité, de sociabilisation, d’émancipation et de partage. Il s’inscrit dans une démarche globale visant à améliorer les conditions de vie des personnes en situation de précarité et/ou en isolement social et nous prouve que l’alimentation est bien plus qu’une simple nécessité : c’est un vecteur de lien social.
Le Pied-de-Mouton, situé au cours Julien, est une cantine solidaire et engagée qui promeut l’accessibilité à une alimentation saine, la mixité sociale et la lutte contre le gaspillage alimentaire.
A travers la revalorisation d’invendus et la cuisine ouverte à tous.tes, l’équipe propose des repas équilibrés, végétariens, à partir de produits de qualités, le tout concocté par des passionnés comme des amateurs. Avec comme conviction que bien manger devrait être un droit pour tous.tes, la structure permet l’accès à une alimentation saine et équilibrée et notamment aux personnes les plus vulnérables en mettant en place une politique de prix échelonnés et des repas à 1€ symbolique.
Ce système de prix encore peu connu permet, pour le même repas, d’avoir un tarif solidaire, un tarif normal et un tarif de soutien. C’est donc un restaurant où tous les budgets peuvent venir manger !
La cuisine étant réputée pour rassembler, les murs ont été coupés afin qu’on puisse voir les coulisse de la préparation des repas mais aussi, pour qu’on n’ait plus peur de demander à y rentrer ! Dans cet espace d’échange, on y rencontre alors des professionnel.les, des passionné.es, des futur.es chef.fes, ou des personnes du quartier, tous réunis autours du même objectif : apprendre, partager et bien manger.
Les personnes porteuses de handicap sont deux à trois fois plus touchées par le chômage que le reste de la population ; Seules 0,5% des personnes atteintes de handicap mental travaillent en milieu ordinaire. Ainsi elles sont plus favorables à être touchées par la précarité alimentaire et l’exclusion sociale. Des structures s’engagent pour pallier ce phénomène. Des restaurants comme Café Régal ou le Café Joyeux emploient uniquement des personnes en situation de handicap mental et cognitif. Des personnes trisomiques s’occupent de l’accueil, la gestion de la caisse, la cuisine, ainsi que tout le service en salle. Un lieu de travail, de rencontre et aussi d’apprentissage, les deux proposant des cursus professionnalisant.
A Marseille, comme ailleurs, la communauté s’organise et crée des espaces de solidarité face aux problèmes de précarité et de solitude. Des solutions existent, soutenons les et encourageons l’art du partage !